Le Living Lab Vieillissement et Vulnérabilités (LL2V) est un dispositif d’expérimentation, d’évaluation, de recherche et de développement de solutions de prévention et d’accompagnement des situations de vulnérabilités fréquentes dans le grand âge. Implanté au CHU de Rennes avec un réseau de partenaires bretons, il a pour objectif de promouvoir et d’expérimenter scientifiquement des innovations au service des personnes âgées, et des professionnels de la gérontologie. La maladie d’Alzheimer et ses incidences sur la qualité de vie des personnes agées y sont particulièrement étudiées.
Interview de Kevin Charras, psychologue, Docteur en psychologie environnementale et Directeur du Living lab Vieillissement et Vulnérabilités
Docteur Charras, pouvez-vous nous parler de l’axe « maladie d’Alzheimer » au sein du Living Lab Vieillissement et Vulnérabilités (LL2V) ?
Le LL2V, en collaboration avec le CHU de Rennes et l’ARS Bretagne, travaille actuellement à la recherche et à la mise en œuvre de projets innovants axés sur les interventions non médicamenteuses pour les personnes âgées atteintes de la maladie d’Alzheimer. Notre objectif est de proposer des solutions concrètes pour améliorer la prise en charge et la qualité de vie de ces personnes.
Vous avez mentionné que 50 % des demandes des EHPAD concernent des symptômes psychiatriques et comportementaux aigus chez les patients Alzheimer. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Effectivement. Grâce à la plateforme de télé-expertise utilisée par le CHU de Rennes, nous avons constaté que la moitié des sollicitations des EHPAD sont liées à des symptômes psychiatriques et comportementaux aigus chez des personnes atteintes de la maladie Alzheimer ou apparentées. C’est une réalité qui nous pousse à repenser nos approches pour répondre efficacement à ces besoins.
La Haute Autorité de Santé recommande en première intention des interventions non médicamenteuses pour ce type de problématique. Cependant, les EHPAD ne disposent pas toujours des structures et des ressources nécessaires pour appliquer ces interventions, qui peuvent inclure des techniques telles que la musicothérapie, le toucher massage, ou simplement la présence et la stimulation humaine pour apaiser les crises d’anxiété, de dépression ou d’apathie.
Quelles solutions sont mises en place pour pallier ce manque de moyens dans le parcours de soin des personnes âgées touchées par Alzheimer ?
Plusieurs expérimentations existent pour soutenir le parcours de soin des personnes atteintes d’Alzheimer, tant en établissement qu’à domicile. Par exemple, nous travaillons à un projet avec l’ARS Bretagne pour former les professionnels de santé sur les pratiques préventives. Nous travaillons également à l’expérimentation d‘outils numériques, comme la réalité virtuelle et la téléconsultation, en collaboration avec le CHGR, pour réduire les symptômes dépressifs des personnes âgées à domicile.
L’architecture des établissements joue également un rôle clé, en partenariat avec le groupe HSTV et le GCSMS Comète Bretagne, nous repensons les espaces dans une approche domiciliaire. Cela aide les malades à retrouver leurs repères, ce qui réduit les troubles du comportement et ralentit la dégradation cognitive.
Pouvez-vous nous en dire plus sur l’importance de l’architecture des lieux d’accueil pour ces patients âgés atteints d’Alzheimer ?
Une architecture adaptée est essentielle pour maintenir les capacités des patients et freiner leur déclin. Créer des espaces qui ressemblent à un chez-soi et où les patients peuvent s’approprier l’environnement contribue à réduire le stress et les comportements perturbateurs.
L’acceptabilité des dispositifs numériques est-elle un défi dans vos travaux ?
C’est en effet un enjeu important. Avec des partenaires comme la startup Emobot, nous travaillons sur l’acceptabilité des technologies numériques par les personnes âgées. Ces dispositifs doivent être perçus comme non invasifs pour être véritablement adoptés. Nous étudions donc comment intégrer ces outils de manière respectueuse et intuitive dans la vie des personnes âgées.
Alzheimer, grand âge : le living lab peut-il encore accueillir des expérimentations ?
Le LL2V est toujours ouvert aux collaborations et aux nouvelles expérimentations. Notre expertise scientifique nous permet de mener des projets de recherche ambitieux avec une mission d’intérêt général, pour faire avancer la connaissance et améliorer l’accompagnement des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et les personnes âgées en perte d’autonomie. Nous travaillons également sur toutes les pathologies et problématiques liées au grand âge !
💡 Kevin Charras a co-coordonné un ouvrage sur l’agencement des environnements de soins et des lieux de vie des personnes agées Alzheimer. Il y a réuni les avancées de chercheurs du monde entier. Le livre est téléchargeable gratuitement sur ce lien.
Kevin Charras a également écrit deux ouvrages, un sur la maladie d’Alzheimer et les troubles apparentés, l’autre sur l’empouvoirement des personnes en situation de handicap cognitif et physique. Ouvrages à retrouver ici.
Publié le 19/11/2024